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Jusqu’où doit aller le niveau de coopération entre exportateur et importateur ?

Jusqu’où doit aller le niveau de coopération entre exportateur et importateur ?

Jusqu’où doit aller le niveau de coopération entre exportateur et importateur ? Jusqu’à un certain point, la coopération entre exportateur et importateur a un effet positif sur la performance à l’export. Mais la recherche montre aussi qu’un niveau de coopération trop élevé finit par avoir des effets négatifs. Nos conseils pour éviter ces effets pervers.

 

La coopération ne débouche pas toujours sur de la performance

La relation entre exportateur et importateur s’établit le plus souvent sur le long terme, et elle est d’une importance capitale pour le succès à l’international. La coopération entre ces deux acteurs a un effet positif sur la performance à l’export. Mais il existe deux bémols, mis en évidence par les travaux récents de Claude Obadia, professeur à l’ESCE. D’abord, cet effet positif est seulement indirect, il passe obligatoirement par l’effort du distributeur. La coopération seule, sans la contribution effective du distributeur, ne produit pas de résultat positif. Mais surtout, contrairement aux idées reçues, à partir d’un certain niveau la coopération devient contre productive : si l’on pousse trop loin la coopération, vers trop de familiarité ou vers une forme d’ingérence par exemple, alors l’effet de la coopération sur la performance devient négatif. 

1. Déceler les biais introduits par l’excès de coopération

Quelle que soit la qualité des relations d’affaires que l’on entretient avec un importateur, il est indispensable de vérifier régulièrement les niveaux de performance économique, sans se laisser aveugler par la qualité de la coopération ou des liens relationnels. La collaboration exportateur-distributeur entraîne en effet des biais importants.

 

1.1 Le biais de préservation de la relation à tout prix 

Il arrive que les relations coopératives dérivent par exemple vers un fonctionnement où l’objectif principal consiste à préserver la relation coûte que coûte, « parce que c’est un bon distributeur » ou « parce qu’on a construit une bonne relation », ce qui introduit un biais par rapport à la recherche de la performance. Ceci s’explique par la difficulté de recruter un nouvel importateur et le délai nécessaire pour développer des relations de confiance. Tant et si bien qu’on se montrera plus indulgent avec le partenaire actuel. Ce biais amène à faire des efforts pour préserver la relation, à éviter de créer des conflits, à se montrer indulgent et à mettre les problèmes « sous le tapis », au détriment de la performance. Aussi la question ne devrait jamais être « continue-t-on avec cet importateur ? » mais plutôt « si on devait créer une relation aujourd’hui, le ferait-on avec cet importateur ? »

 

1.2 Le biais de confusion des objectifs

L’excès de coopération, la tentative constante de satisfaire les demandes du partenaire, peuvent amener à perdre de vue ses propres objectifs. En effet, quand on veut aller trop loin pour aider l’autre à atteindre ses objectifs, on peut en arriver à sacrifier un peu les siens. C’est un biais extrêmement grave, et pour l’éviter il faut veiller, de façon régulière, à ce que des personnes extérieures à la relation avec le partenaire soient en mesure de comprendre vos actions et de les associer à des objectifs concrets de votre entreprise.

 

1.3 Le biais de la pensée unique

Par ailleurs, lorsque les relations sont établies depuis longtemps, un certain confort relationnel peut s’installer et conduire à une forme de pensée unique, marquée par la perte de sens critique et à un appauvrissement de la diversité des idées. L’échange avec le partenaire tend alors à s’éloigner de la dialectique, et engendre un risque grave d’excès de confiance dans la prise de décision et de manque de prise en compte des expériences négatives. Là aussi, pour éviter cette tendance à la pensée unique, il faut trouver de l’inspiration dans des échanges contradictoires et impliquer de temps en temps  des tiers qui ne gèrent pas directement  la relation (le chef d’une autre zone export par exemple).

 

1.4 Le biais de familiarité

Un excès de familiarité dans la relation professionnelle peut amener à un manque de respect de la souveraineté de l’importateur. Une certaine distance dans la relation exportateur-distributeur doit être maintenue même si la relation interpersonnelle devient plus amicale.

 

2. Respecter l’indépendance des distributeurs

Au niveau du management des relations export, il est essentiel de préserver l’indépendance des distributeurs, des importateurs ou des agents. Il est contre productif de chercher à s’ingérer dans les affaires de ses partenaires qui pourraient y voir une intrusion excessive et réagir très négativement. Les imbrications, les interférences et les intrusions dans les activités du distributeur produisent immanquablement des effets négatifs sur la performance – même si par ailleurs l’ambiance de la coopération reste excellente. Il est important de ne pas perdre de vue que le distributeur est avant tout une entreprise souveraine dans sa stratégie et ses décisions.

 

3. Analyser la performance de manière objective

Au départ la coopération permet d’aligner les objectifs et d’être plus efficace ; elle permet de mieux faire circuler l’information, de créer une relation de confiance, etc. Mais plus la coopération prend de l’importance, plus le risque de créer des biais s’accroît au niveau de la performance. Comment identifier le moment, le point d’inflexion, où l’on bascule vers trop de coopération ? Au-delà du monitoring de la performance économique, le manager export doit se poser les bonnes questions dans sa façon de gérer les relations avec les distributeurs : ma relation est-elle biaisée par la peur de perdre le distributeur ? Si je cherchais un distributeur aujourd’hui, repartirais-je avec celui-ci ? Suis-je bien au clair sur mes objectifs, et toutes mes actions tendent-elles vers ces objectifs ? Mon échange avec le distributeur est-il construit sur une dialectique, un échange contradictoire ? Le formalisme de la relation est-il bien respecté ? Chacune de ces réponses peut être le signe d’une relation dominée par la coopération, et dont la performance va diminuer.

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